Vulnérable souveraineté

Soyouz CSO-2 souveraineté Europe
Le lanceur Soyouz ST de CSO-2 mis en place au Centre spatial guyanais en 2020. Crédit : ESA - Cnes - Arianespace.

Éditorial en accès libre : Dans son discours à Toulouse le 16 février, le président Emmanuel Macron a rappelé combien, lorsque l’on parle de souveraineté, l’espace représente « la souveraineté des souverainetés », et souligné le rôle essentiel joué par l’autonomie en matière d’accès à celui-ci. Avec le programme Ariane, l’Europe s’est enorgueillie depuis plus de quarante ans d’avoir acquis et préservé, de haute lutte, son indépendance en la matière. Toutefois, la crise russo-ukrainienne, et l’avalanche de conséquences qui pourraient en découler, met en évidence les limites de cette souveraineté.

Que des sanctions tombent et le Soyouz pourrait ne plus jamais décoller de Guyane, clouant au sol plusieurs missions qui en dépendent, du maintien de la constellation Galileo au renouvellement des satellites météorologiques MetOp, en passant par l’observatoire scientifique Euclid. Que l’infrastructure ukrainienne soit mise à mal et adieu l’Avum, étage supérieur de Vega, dont les moteurs sont fabriqués à Dnipro (ex-Dniepropetrovsk).

Avum RD843 Dnipro
Le moteur ukrainien RD-843 propulse l’étage supérieur Avum du lanceur européen Vega. Crédit : ESA.

Avec la fin d’Ariane 5, seule reste Ariane 6, dont le premier vol est annoncé à la fin de l’année. Quel est le « plan B » en cas de retard ou de problème de qualification ? Certaines missions devaient passer sur Soyouz, si Soyouz il y a. Plus encore que la concurrence de SpaceX, la politique du Kremlin condamne donc Ariane 6 au succès.

Alors jusqu’ici, au nom de la coopération, le secteur spatial a toujours été épargné par les sanctions envers la Russie, ce qui a permis à la Station spatiale internationale de survivre. Ce choix de la coopération, favorisé par les Européens, que ce soit pour ExoMars ou pour les vols habités, est-il pérenne ? Rappelons que pour que ce soit véritablement un choix, il faudrait d’abord avoir les moyens de s’en passer.

Compte tenu de l’évolution rapide de la situation entre l’Ukraine et la Russie, nous avons souhaité publier cet éditorial en avance. Retrouvez notre n°142 jeudi soir.

Xavier Philippon
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Xavier Philippon

On s’aperçoit aujourd’hui que cet éditorial était prophétique.
« Adieux Soyouz, et adieu Avum ! »
L’Europe spatiale va devoir se prendre sérieusement en main.