Antenne hautes performances pour microsatellites

Antennes Reflectarray MarCO
Les antennes Reflectarray des cubesat MarCO : pliée (à g.) et dépliée (à d.), avec leurs motifs. Crédit : Nasa - JPL - Caltech.
Le Cnes a confié à Anywaves, pilier du « New Space » à Toulouse, le développement d’un démonstrateur d’antenne plane simulant une parabole. Le concept pourrait changer la donne sur le marché des micro et nanosatellites.

L’équipementier toulousain Anywaves développe actuellement une nouvelle technologie de réflecteurs plans pour antennes qui permettra à des satellites de la gamme micro et nano de disposer des performances de réflecteurs paraboliques classiques sans avoir à en gérer la complexité d’installation et surtout de déploiement. Le concept, dit « Reflectarray », s’apparente à celui de la lentille de Fresnel en optique. Plutôt que de focaliser les ondes en utilisant la forme globale de l’antenne, il s’agit d’utiliser des motifs à sa surface pour les réfléchir dans des directions convergentes.

« Du point de vue de l’onde électromagnétique, ce panneau plan se comporte comme une parabole métallique », explique Nicolas Capet, P-DG d’Anywaves.

Le concept date déjà d’une vingtaine d’années mais il n’a pas trouvé d’application dans le spatial avant 2018 (cf. encadré), car il n’apportait pas un gain significatif par rapport aux antennes traditionnelles sur les grosses plateformes. L’évolution récente des applications et de l’industrie vers la miniaturisation des plateformes et l’orbite basse amène aujourd’hui à reconsidérer les perspectives de marché, surtout grâce à ses avantages pour le stockage et le déploiement sur de grappes de microsatellites.

Objectif industriel

Anywaves a été sélectionnée fin 2020 par le Cnes pour développer un démonstrateur d’antenne dépliable, opérationnel de la bande X à la bande Ka, qui soit adapté pour les plus petites plateformes. L’objectif de cet effort est de mettre sur pied une filière industrielle pour des applications scientifiques et commerciales. De telles antennes à grand gain trouveront ainsi aussi bien leur place sur des sondes d’exploration de l’espace lointain que pour des constellations sur orbite basse.

Les agences visent l’espace lointain

Aux États-Unis, des antennes de type Reflectarray ont déjà été mises en œuvre par la Nasa sur deux cubesats 6U, MarCO-A et B, qui ont accompagné la sonde Insight vers Mars en 2018. En Europe, l’ESA finance la réalisation d’un démonstrateur à trois panneaux développé par Ticra, au Danemark. Il doit voler en 2022 sur GomX-5, un cubesat 12U développé par le constructeur danois GomSpace. Une antenne similaire devrait ultérieurement équiper la mini-sonde M-Argo (Miniaturised Asteroid Remote Geophysical Observer) qui sera lancée vers un astéroïde géocroiseur.

La pépite toulousaine s’est entourée d’autres équipementiers du « New Space à la Française » – Clix Industries, Comat et Mecano ID – pour réaliser et tester un démonstrateur d’ici la fin de 2021, notamment avec des essais de déformation lors de cyclages thermiques sous vide. À partir de celui-ci, l’équipe souhaite développer et qualifier un modèle d’ingénierie pour un essai en vol dès qu’une opportunité de mission se présentera, avec une antenne à un ou plusieurs panneaux adaptable sur un cubesat 6U, 12U ou 16U. L’industrialisation sera préparée dans la foulée pour tenter de s’imposer comme leader européen sur cette nouvelle technologie.

Antenne plane multi-applications

« Si on veut mettre une antenne parabolique traditionnelle sur un tout petit satellite, il faut être extrêmement inventif pour mettre au point des mécanismes de déploiement, souligne Nicolas Capet, P-DG d’Anywaves. C’est très compliqué et cela coût extrêmement cher. » Comparativement, les antennes planes Reflectarray sont faciles à fabriquer, faciles à stocker et toute la technologie se concentre dans les motifs à sa surface.

La difficulté se concentre sur la précision et la stabilité des motifs, de l’ordre de la centaine de microns sur des plages de températures importantes. Différentes technologies vont donc être testées pour définir la plus adaptée au besoin. Des technologies de circuit imprimé sur panneau composite à forte stabilité thermoélastique ont déjà été testées aux États-Unis, mais Anywaves travaille aussi sur des technologies entièrement métalliques, avec des motifs réalisés par usinage ultrafin ou par électro-érosion. « Nous allons chercher l’état de l’art en matière de mécanique de précision, reconnaît Nicolas Capet. Nous voulons sélectionner la technologie la plus adaptée à notre filière de produits. »

La taille des motifs étant liée à la longueur d’onde, le marché visé par Anywaves concerne essentiellement les fréquences au-delà de la bande X. Pour des fréquences plus basses (bande L et S voire UHF/VHF), qui nécessiteraient donc des antennes plus grandes, l’équipementier étudie plutôt d’autres technologies, notamment pour l’Internet des objets (IoT) et la surveillance de spectre.

Pour le Cnes, la technologie aurait de nombreuses applications possibles, de l’altimétrie aux constellations de télécommunications.

En 2020, Anywaves a connu un bon niveau d’activité malgré la crise et a pu atteindre ses objectifs en terme de chiffre d’affaires et de développements technologiques. Les plans de développement d’activité à l’export, notamment vers la Chine et l’Inde, ont été les plus affectés. De manière générale, Nicolas Capet est optimiste sur le développement des marchés avec la multiplication des projets de constellations, notamment pour l’IoT.

« Crise sanitaire ou pas, la tendance de fond est là », assure-t-il.

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