L’Europe spatiale mise sur une ambition de souveraineté

Budget Europe
L'Europe vue par Meteosat. Crédit : Eumetsat.
Année charnière pour l’Europe spatiale : 2022 doit voir l’introduction de nouveaux lanceurs, le lancement d’un projet de constellation de souveraineté, et le renforcement de son statut de puissance spatiale de rang international.

Comme le veut la tradition des vœux de début d’année, en moins de deux semaines, le président du Cnes, le directeur général de l’ESA et le P-DG d’ArianeGroup se sont succédé dans l’exercice du bilan de l’année écoulée et des enjeux de l’année à venir. L’exercice était particulièrement stratégique pour Philippe Baptiste, Josef Aschbacher et André-Hubert Roussel, tant il est important pour les agences et l’industrie de bien faire comprendre aux médias, et surtout à ceux qui les lisent, combien l’Europe spatiale est à un moment charnière de son histoire, avant d’aller demander aux gouvernements qui la financent de lui donner les moyens de ses ambitions.

Le 25 et le 26 janvier, à Bruxelles, la conférence annuelle European Space Policy a également été l’occasion pour Thierry Breton, commissaire européen en charge du marché intérieur, mais aussi du secteur spatial, de présenter ses objectifs et leur articulation.

L’année sera rythmée par deux grands rendez-vous : le Sommet spatial européen, qui se tiendra à Toulouse le 16 février, et la réunion du conseil de l’ESA au niveau ministériel à Paris les 22 et 23 novembre. Le premier combinera une réunion du Conseil de compétitivité européen le matin et une réunion des ministres européens en charge du spatial l’après-midi. Ce sera l’occasion de présenter les grandes ambitions des uns et des autres et de compter les soutiens derrière chaque grand projet. Le Conseil de l’ESA, après neuf mois de tractations supplémentaires, traduira ces ambitions en projets, voire en programmes, et commencera à en fixer le cadre budgétaire.

Signature ESA Euspa FFPA L'Europe
Signature du FFPA le 22 juin 2021 à Bruxelles. De g. à d. : Timo Pesonen, directeur général de la DG Defis (Defence Industries & Space), Manuel Heitor, ministre portugais de la Science, de la Technologie et de l’Éducation supérieure, représentant la présidence portugaise de l’Union, Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, Josef Aschbacher, directeur général de l’ESA, et Rodrigo da Costa, directeur exécutif de l’Euspa. Crédit : Euspa.

La France ayant pris la présidence de l’Union européenne, mais aussi la co-présidence du Conseil de l’ESA, la souveraineté sera le maître mot des propositions à venir, et avec elle trois grands axes : autonomie de l’accès à l’espace, télécommunications sécurisées et sécurité des infrastructures orbitales.

Accélérer le présent et inspirer l’avenir de l’Europe

De son côté, Josef Aschbacher, directeur général de l’ESA, a articulé son projet autour de cinq points : trois « accélérateurs » et deux « inspirateurs » qu’il a présenté le 19 novembre à l’occasion du conseil ministériel intérimaire de Matosinhos, au Portugal. Le premier des trois accélérateurs se présente un peu comme la contribution de l’ESA au « pacte vert » européen et utiliserait notamment les 300 pétaoctets de données générées quotidiennement par Copernicus pour créer un « double numérique » de la Terre. Cette méga-simulation, basée sur notre connaissance réelle de la planète et des mécanismes qui la régissent, permettrait d’évaluer les scénarios d’évolution du climat, mais aussi d’évaluer les conséquences des politiques environnementales.

Le deuxième accélérateur vise la mise en place de moyens de réponse « rapides et résilients » face aux situations de crise, notamment les catastrophes naturelles, génératrice de milliards d’euros de dégâts. Cela passera par une meilleure mise à disposition des moyens d’observation, de calcul et de communications, tels que la future constellation souveraine européenne.

Le troisième accélérateur concerne pour sa part la surveillance du ciel pour la protection des infrastructures spatiales européennes, et la vie des astronautes européens dans l’espace.

Juice L'Europe spatiale
La sonde Juice, première mission européenne vers les lunes de glace en attendant le retour d’échantillons. Crédit : Airbus.

En complément de ces trois thématiques, qui répondent à des inquiétudes, Josef Aschbacher propose deux axes très ambitieux pour inspirer et faire rêver les nouvelles générations. Le premier serait une mission de retour d’échantillons d’une des lunes de glace des planètes géantes susceptibles d’abriter un océan subglaciaire (Europe ou Encelade, par exemple), avec éventuellement la possibilité d’y détecter des traces de vie. Le second « inspirateur » serait le développement d’une capacité autonome de vols habités.

Reste à savoir si un consensus européen va pouvoir être dégagé autour de ces thématiques, afin de permettre à l’Europe de fortifier et préserver son rôle dans l’écosystème spatial global.

Budgets à la hausse

L’ESA va bénéficier en 2022 d’un budget en hausse d’environ 10 % pour atteindre 7,152 Md€, dont 28 % proviendra de l’Union européenne.

Le Cnes aussi voit ses ressources progresser pour atteindre 2,566 Md€, dont 1,184 Md€ représente sa contribution à l’ESA. À noter qu’une bonne partie du plan de relance de 365 M€ a déjà été contractualisée en 2021 et ne représente plus que 55 M€ dans le budget de cette année.

Notre dossier : 2022, année charnière pour l’Europe spatiale

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