Contraste

Huit minutes. À peine le temps que met un photon pour nous parvenir du Soleil. À cinq jours d’intervalle, deux essais de huit minutes ont porté les espoirs de deux mondes ô combien dissemblables. D’un côté, trente-trois moteurs et un déchaînement de puissance inégalé ont permis l’envol du plus gros lanceur jamais développé. De l’autre, la mise à feu d’un unique moteur sous un lanceur six fois plus petit, qui est resté sagement sur sa table de tir, comme cela était prévu.

Au Texas, le deuxième vol du Super Heavy/Starship a été accueilli avec enthousiasme. Peu importe qu’une nouvelle fois, l’objectif n’ait pas été atteint. Les commentateurs n’hésitent pas à comparer ces huit minutes au succès du SLS un an plus tôt. Lui, avait pourtant réussi une mission lunaire de bout en bout à la première tentative. Le SLS se voit reprocher son coût pharaonique et ses cinq ans de retard, mais nul ne sait combien coûte le Starship. Tout le monde a oublié qu’il a déjà quatre ans de retard et a explosé avant d’avoir fini sa mission. Les fans d’Elon Musk n’en ont cure ; pour eux, la route de Mars est ouverte.

En Guyane, pas de grand spectacle. Dans les équipes, c’est le soulagement qui l’emporte. Ici, point de méthode itérative à coup de tentatives et d’échecs. Le programme, invisible du grand public pour son manque de flamboyance, accuse quatre ans de retard, mais son budget de développement reste maîtrisé.

D’un côté, un tycoon tout puissant bouscule les règles et veut tout contrôler sans rendre de comptes. Après avoir colonisé l’orbite basse en la noyant de satellites, il veut en faire autant avec l’espace lointain. De l’autre, des Européens se contorsionnent pour obéir aux contraintes d’une coopération qu’ils se sont infligé.

Sans Starship, la Nasa ira quand même sur la Lune. Sans Ariane, l’Europe n’ira nulle part.

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