ExoMars victime de son statut

Le TGO à son arrivée autour de Mars. Crédits : ESA, ATG Medialab.
Programme plus technologique que scientifique ExoMars ne bénéficie pas d’une contribution obligatoire des États membres de l’ESA à son budget de 1,2 Md€.

«Les difficultés de financement auxquelles le programme ExoMars est confronté depuis son origine s’expliquent par son statut particulier à l’écart du programme scientifique de l’ESA », estime le Pr. Jean-Pierre Bibring de l’Institut d’astrophysique spatiale (IAS) de l’université Paris-Sud à Orsay, dont le curriculum regorge de missions de l’ESA (Mars Express, Philae, ExoMars 2018), mais aussi de la Nasa (Cassini) ou de la Jaxa (Hayabusa 2). Véritable socle de la coopération spatiale européenne, le programme scientifique de l’ESA bénéficie d’un financement assuré sur la durée via une contribution obligatoire des États membres au prorata de leur PIB. En contrepartie, le choix des missions est réalisé selon un processus d’évaluation par un comité scientifique consultatif indépendant (SSAC) qui privilégie le meilleur retour scientifique possible et garantit un équilibre entre les différentes disciplines : planétologie, observation de l’univers, relations Terre-Soleil et physique fondamentale.

Préparer l’envoi d’astronautes

Le programme Aurora, auquel appartient ExoMars, a été décidé en janvier 2002 pour préparer les technologies nécessaires à l’envoi d’astronautes vers la Lune, Mars et au-delà. Il s’agit d’un programme « optionnel » de l’ESA, auquel chaque État contribue selon son bon vouloir et le retour industriel qu’il espère en retirer. « Cela lui permet de s’affranchir de l’évaluation de son retour scientifique mais le prive d’un budget solide » note le Pr. Bibring.

De fait, Aurora est à l’origine un programme prioritairement technologique qui dépendait de la direction des Vols habités de l’ESA. Il a été placé sous la responsabilité de la direction des programmes scientifiques en 2008, entraînant une dangereuse confusion. Selon le Pr. Bibring, le budget scientifique annuel progressant peu – il compense à peine l’inflation grâce à l’arrivée de nouveaux États-membres contributeurs – certains représentants des autres communautés scientifiques spatiales verraient d’un bon œil que les missions martiennes, voire lunaires, migrent vers le programme Aurora, afin de laisser plus de chances de sélection aux autres missions scientifiques – moins « spectaculaires » – en compétition auprès du SSAC.

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