Imaginaire fossile

À quand remonte votre vision de référence de l’entreprise, de l’industrie, du travail en usine, du secteur aéronautique ? Si vous lisez Aerospatium, les concept d’« usine 4.0 », de numérisation de l’industrie, de cobotique et de décarbonation de la production vous sont familiers. Mais qu’en est-il du reste de la population, surtout de celle qui ne travaille pas dans un secteur de pointe et qui ne lit pas régulièrement la presse spécialisée et préfère se fier aux réseaux sociaux ? Il y a des chances que son imaginaire se soit cristallisé sur l’usine 2.0, voire 1.0 pour ceux qui considèrent encore Émile Zola comme un auteur moderne.

« Sur notre budget de 4 Md€ consacré à l’innovation, 75 % sont dédiés à la décarbonation. Lorsque je dis ça, mes interlocuteurs tombent des nues, persuadés que l’industrie ne se préoccupe pas des questions climatiques ». Cet étonnement est celui d’Eric Dalbiès, directeur de la stratégie de Safran. Il résume la méconnaissance du public de ce que l’industrie aéronautique et spatiale française et européenne est en train d’accomplir.

Les anticapitalistes et les écologistes radicaux n’ont pas le monopole d’une vision datée du monde de l’industrie. Le commun des mortels garde une vision d’usines qui n’auraient que peu évolué depuis 1970 et reste persuadé que les seules avancées viennent des États-Unis.

Leur vision du monde s’est arrêtée sur les images des Trente glorieuses, des luttes syndicales de mai 1968 et de la puissance américaine des années Apollo, y compris pour les générations qui n’ont pas connu ces époques.
Les effets de ce ressenti sont nombreux, de la taxonomie des entreprises qui stigmatise celles participant à l’effort de défense, aux difficultés de recrutement auxquelles est confronté l’ensemble du secteur. Il est temps de ranger ces fossiles au musée et de mettre en lumière la réalité d’aujourd’hui.

Xavier Philippon
Abonné
Xavier Philippon

J’ajouterais que contrairement à d’autres produits industriels, l’avion ne soufre d’aucune obsolescence programmée. Il est conçu pour être réparable, interopérable et rétrofitable.